Jean-Pierre Frachon : le versant humain des faces de vertige
Aller vers les hommes en passant par les sommets, ce n’est ni le plus court chemin, ni le plus facile, mais c’est le chemin le plus sûr pour effectuer de vraies rencontres. C’est celui qu’a choisi Jean-Pierre Frachon depuis plus de 40 ans.
Né à Chamalières, dans le Puy de Dôme en 1947, Jean-Pierre décide à l’adolescence de consacrer sa vie à emprunter les chemins escarpés des cimes et de devenir guide de haute montagne. Son palmarès est aussi éclatant que la neige qui couvre les innombrables sommets qu’il a réussi à gravir. Qu’on en juge ! Premier Français et quatrième au monde à avoir réussi le challenge des « Seven Summits », c’est-à-dire les points culminants de chaque continent : Everest en Asie, Aconcagua en Amérique du Sud, Mc Kinley en Amérique du Nord, Elbrouz en Europe, Vinson en Antarctique, Kilimandjaro en Afrique et Pyramide de Carstenz en Océanie. Il compte aussi à son actif la descente des gorges du Tsang Po (première mondiale) et de nombreuses premières françaises (Shivling, Vinson, la face nord du Kan Tengri, El Muerto….), l’ascension de sommets célèbres (Cervin, Yosemite, Ama Dablam) et d’autres moins connus, voire inconnus. Jean-Pierre réalise tous ces exploits sportifs avec un enthousiasme qui ne se dément pas d’années en années et qui lui fait apprécier toutes les montagnes, aussi bien celles de son Auvergne natale que celles du bout du monde.
Mais tout ceci ne constitue que la partie émergée de la montagne de Jean-Pierre, sa face visible qui, si elle n’existait que seule, ferait de lui, certes un talentueux alpiniste, mais seulement un alpiniste dont les ascensions se réduiraient à des performances, des exploits avec tout ce que cela comporte d’égocentrisme. Aux faces de vertige, il n’a de cesse d’allier la face humaine, de donner un visage à ce monde minéral. De sa rencontre avec les Kurdes, en 1972 aux confins de la Turquie et de l’Irak, date cette prise de conscience : la montagne est peuplée, habitée par les hommes, leurs vies, leurs rites, leurs croyances. Aux noms des cimes, il est primordial pour lui d’associer ceux des peuples montagnards : Sherpa, Danis, Massaï, Quechuas, entre autres, qui donnent en partage leur univers pour peu qu’on veuille s’y intéresser. Partage, ce mot définit à merveille la démarche de Jean-Pierre. En 1988, il fait partie de l’équipe pionnière qui fonde la société de voyages d’aventures et d’explorations Atalante. Il guide ainsi ses clients à la découverte des cimes et d’eux-mêmes, vers la réalisation de leurs rêves.
Devenu au fil des expéditions un photographe émérite, il fait partager ses découvertes, ses émotions et sa passion de multiples manières, notamment par des conférences, des expositions, des diaporamas, ainsi que des livres. Il offre également à ceux que la vie a blessés d’accomplir ce à quoi ils n’auraient même pas osé rêver… Il a ainsi emmené des jeunes aveugles et des jeunes séropositifs au mont Blanc et au Kilimandjaro.
On y voit non seulement loin dans l’espace mais aussi dans l’avenir.
Ses voyages lui ont ouvert les yeux. Dans l’esprit de la plupart des gens, les montagnes séparent les hommes. Dans l’esprit de Jean-Pierre, c’est l’inverse. Elles sont prétextes à des rencontres, à aller voir plus loin, au-delà des barrières et des a priori, à considérer le monde autrement, différemment. C’est pour cela qu’il s’est engagé aux côtés de « clients » devenus ensuite des amis et d’Arjun, son filleul Népalais, pour créer l’association « Grandir au Népal » qui aide les enfants népalais à poursuivre leurs études et à construire leur avenir. Car Jean-Pierre a retenu la leçon des sommets : on y voit non seulement loin dans l’espace mais aussi dans l’avenir.
François Graveline
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